« Privatisations : la République en marché (EP.88) » : différence entre les versions

Aller à la navigation Aller à la recherche
aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Ligne 1 : Ligne 1 :
__NOTOC__
__NOTOC__
{{Infobox|image=|saison=7|épisode=88|date=11/04/2019|durée=?:??}}
{{Infobox|image=|saison=7|épisode=88|date=11/04/2019|durée=12:41}}
Tout doit disparaître... surtout les limites !
Tout doit disparaître... surtout les limites !


Ligne 7 : Ligne 7 :
[https://www.dauphine.fr/en/research/enseignants/detail-cv/profile/francois-xavier-dudouet.html François-Xavier Dudouet] est chargé de recherche au CNRS et directeur adjoint de l'[https://irisso.dauphine.fr/fr.html Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales] (Irisso) à l'université Paris Dauphine. Il a publié, entre autres, "[http://www.lignes-de-reperes.com/catalogue/patrons.htm Les grands patrons en France.Du capitalisme d’État à la financiarisation]" avec Eric Grémont, paru en 2010 aux éditions Ligne de repère.
[https://www.dauphine.fr/en/research/enseignants/detail-cv/profile/francois-xavier-dudouet.html François-Xavier Dudouet] est chargé de recherche au CNRS et directeur adjoint de l'[https://irisso.dauphine.fr/fr.html Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales] (Irisso) à l'université Paris Dauphine. Il a publié, entre autres, "[http://www.lignes-de-reperes.com/catalogue/patrons.htm Les grands patrons en France.Du capitalisme d’État à la financiarisation]" avec Eric Grémont, paru en 2010 aux éditions Ligne de repère.


{{#ev:youtube|https://www.youtube.com/watch?v=M71Onlsd9o8}}
{{#ev:youtube|https://www.youtube.com/watch?v=1hYR2o1}}


== Script ==
== Script ==
                  
Le meilleur des perdants, c’est celui qui refuse de gagner. Bonjour !
Treize milliards d'euros de session en 1986, 26 entre 1993 et 1997, 14 milliards de 1997 à 2002 ... Depuis un peu plus de 30 ans, l’État français s'est pris de passion pour les privatisations. Aucune majorité n'y résiste ! Sur les étales publics, on trouve de tout ! Armement, banques, infrastructures, énergie, médias ... entre 1985 et 2015, le nombre d'entreprises sous contrôle public est passé de 3500 à 1625 et leurs employés de plus de 2,2 millions à moins de 800000. Mais pourquoi céder  aux intérêts privés ce qui appartient à la collectivité ?
Premier argument : lâcher du leste pour éponger la dette. Depuis 2010, c’est le remède prescrit par les trois principaux bailleurs de la Grèce pour éponger sa dette. Doublé d’une cure d’austérité, le traitement a abouti en 2018 : la dette atteint désormais le record de 180 % du PIB… Beau boulot.
Mais ça, c’est pour le court terme. Pour nombre de ses défenseurs, privatiser est une question d’efficacité. Sans compte à rendre, les administrations en charge des services publics s'endormiraient sur leurs lauriers … et rien de mieux que le marché pour leur donner un petit coup de fouet !
C’est pour ces raisons que le gouvernement britannique a décidé de privatiser l’eau à la fin des années 1980 : investir, rénover, réduire les frais. En 2015, la facture est tombée : les prix ont augmenté de 40 % et trois milliards de litres fuient quotidiennement. un cinquième de l’approvisionnement national. Les efforts des entreprises privées se sont orientées ailleurs : entre 2007 et 2016, 95 % des profits ont été distribués aux actionnaires. De l’intérêt général à celui des actionnaires...
14 août 2018, le pont Morandi, à Gênes s’effondre, provoquant la mort de 43 personnes. L’enquête a depuis démontré que l’ouvrage construit en 1982 avait été mal entretenu. 98 % des investissements de renforcement du pont ont été effectué avant la privatisation d’Autostrade d’Italia en 1999. En 2017, Atlantia, concessionnaire du pont et filiale du géant Benetton, affichait pourtant un bénéfice net de 1,17 milliards d’euros. La poule aux œufs d’or s’était laissée plumer.
Mais rassurez-vous, l’État veille. Pour chaque mission confiée au privé, un cahier des charges est établi pour s’assurer que le service soit contrôlé : qualité, accessibilité et prix. En 1995, les 18 concessionnaires des autoroutes françaises s’engagent à limiter l’augmentation annuelle du prix des péages à 70 % de l’inflation. Juré … crashé ! Entre 2009 et 2012, SAPN, ASF et Escota ont affiché une hausse de 2,2 % par an, un point de plus que prévu. Une clause prévoyait des sanctions : 0,3 % du chiffre d’affaires, discrète amende. Que l’État n’a même pas réclamé.
« Tout ça, c’est la faute de l’Europe ! » En êtes-vous bien sûr ? Suivant l’article 345 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, l’UE est neutre dans le choix des formes sociales des entreprises pour le marché intérieur. En clair : dans de nombreux cas, c’est la France qui choisit de privatiser.
Alors que le gouvernement d’Edouard Philippe entame la mise aux enchères des barrages hydroélectriques français prétextant l’injonction de Bruxelles, nos voisins ont pris d’autres options : l’Allemagne les a exclu de la concurrence, la Suède les a soumis à un régime d’autorisation public et l’Italie a maintenu le monopole d’Enel jusqu’en 2029.
A l’étranger, la France défend même activement les privatisations … quand elles bénéficient à ses champions. Par le biais des traités internationaux sur les investissements, les pays occidentaux sécurisent des parts de marché en poussant les autres à ouvrir les secteurs nationalisés à la concurrence. La SNCF, fleuron de nos services publics, est désormais implantée dans 120 pays du monde et réalise un tiers de son activité hors de France. Et pour garantir la pérennité de son emprise, elle joue des clauses de « non retour en arrière » pour dissuader les pays déçus de renationnaliser des privatisations pas assez performantes.
En 2006, l’Argentine, insatisfaite des services de Suez environnement, ramène la gestion de l’eau de Buenos Aires en gestion public. En 2015, le géant français gagne son procès : l’imprudente nation a du régler 405 millions de dollars pour le manque à gagner.
Prétendant défendre l’intérêt général, l’État gestionnaire se retrouve à privilégier les géants privés au nom de la pseudo performance des marchés. Une fois les biens communs bradés, il ne reste plus à l’État qu’à servir de garantie en cas de défaillance : privatiser les profits, nationaliser les pertes. L’éternelle histoire. Quel dogme a convaincu l’état qu’il devait se priver de tout levier ?


== Sources ==
== Sources ==

Menu de navigation