« État d'urgence : plus c'est long, moins c'est bon (EP.58) » : différence entre les versions

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Mais revenons au texte. Le 20 novembre 2015, les députés votent la première prolongation de l'état d'urgence et, au passage, ils dépoussièrent l'original, vieux de 60 ans<ref name=":2" /><ref>http://mouvements.info/letat-durgence-de-2015-2016-un-ideal-type-du-recours-a-lexception-sous-la-ve-republique/</ref><ref>http://www.assemblee-nationale.fr/14/projets/pl3225-ei.asp</ref>. Désormais, les assignations à résidence visent toutes celles et ceux dont le « comportement constitue une menace dangereuse pour la sécurité et l'ordre publics ». Comme un homme qui fait du jogging la nuit dans une tenue suspecte. « Comportement » étrange<ref name=":3" />. Toujours dans la version 2015, les perquisitions administratives sont placés sous le contrôle d'un juge administratif. Il doit vérifier que la mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée. Sauf qu'il ne le fait qu'a posteriori. Contrairement au juge judiciaire habituel, qui lui vérifie en amont. « Désolé m'sieur, finalement, on s'est trompé. »  
Mais revenons au texte. Le 20 novembre 2015, les députés votent la première prolongation de l'état d'urgence et, au passage, ils dépoussièrent l'original, vieux de 60 ans<ref name=":2" /><ref>http://mouvements.info/letat-durgence-de-2015-2016-un-ideal-type-du-recours-a-lexception-sous-la-ve-republique/</ref><ref>http://www.assemblee-nationale.fr/14/projets/pl3225-ei.asp</ref>. Désormais, les assignations à résidence visent toutes celles et ceux dont le « comportement constitue une menace dangereuse pour la sécurité et l'ordre publics ». Comme un homme qui fait du jogging la nuit dans une tenue suspecte. « Comportement » étrange<ref name=":3" />. Toujours dans la version 2015, les perquisitions administratives sont placés sous le contrôle d'un juge administratif. Il doit vérifier que la mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée. Sauf qu'il ne le fait qu'a posteriori. Contrairement au juge judiciaire habituel, qui lui vérifie en amont. « Désolé m'sieur, finalement, on s'est trompé. »  


Cette urgence proclamée par l'État est-elle si récente ? Le plan Vigipirate est en place depuis 1995. Déjà vingt ans de vigilance permanente<ref>http://abonnes.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/04/24/plan-vigipirate-comment-un-dispositif-exceptionnel-est-devenu-permanent_4621647_4355770.html</ref><ref>http://www.rfi.fr/france/20150907-france-plan-vigipirate-dispositif-exception-place-depuis-20-ans</ref>. En Île-de-France, il est à son niveau le plus élevé - alerte attentats - depuis les événements de janvier 2015. Une mesure pourtant prévue pour une durée « très limitée ». Du coup, sur le terrain, les hommes s'épuisent. En avril 2015, trois compagnies de CRS - soit 240 policiers - se sont mis en arrêt maladie pour protester contre une charge de travail excessive<ref>http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20150407.OBS6581/plan-vigipirate-epuises-les-crs-se-mettent-en-arret-maladie.html</ref>. L'intégralité des services de police cumulerait 20 millions d'heures supplémentaires !
Cette urgence proclamée par l'État est-elle si récente ? Le plan Vigipirate est en place depuis 1995. Déjà vingt ans de vigilance permanente<ref>http://abonnes.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/04/24/plan-vigipirate-comment-un-dispositif-exceptionnel-est-devenu-permanent_4621647_4355770.html</ref><ref>http://www.rfi.fr/france/20150907-france-plan-vigipirate-dispositif-exception-place-depuis-20-ans</ref>. En Île-de-France, il est à son niveau le plus élevé - alerte attentats - depuis les événements de janvier 2015. Une mesure pourtant prévue pour une durée « très limitée ». Du coup, sur le terrain, les hommes s'épuisent. En avril 2015, trois compagnies de CRS - soit 240 policiers - se sont mis en arrêt maladie pour protester contre une charge de travail excessive<ref>http://tempsreel.nouvelobs.com/societe/20150407.OBS6581/plan-vigipirate-epuises-les-crs-se-mettent-en-arret-maladie.html</ref>. L'intégralité des services de police cumulerait 20 millions d'heures supplémentaires<ref>http://www.europe1.fr/societe/police-un-compromis-sur-les-heures-supplementaires-2706328#xtor=CS1-16</ref> !


"En avril 2015, trois compagnies de CRS se sont mis en arrêt maladie pour protester contre une charge de travail excessive" : http://is.gd/W28wBa
Avec l'opération Sentinelle, lancée en janvier 2015, plus de 10.000 militaires patrouillent actuellement sur le sol français<ref>http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/defense-operation-sentinelle-debat-au-parlement-20160316.html</ref><ref>http://www.senat.fr/espace_presse/actualites/201603/lemploi_des_forces_armees_sur_le_territoire_national_pour_proteger_la_population_en_debat.html</ref><ref>http://www.rfi.fr/france/20160107-france-vigipirate-sentinelle-dispositif-anti-attentat-terrorisme</ref>. Pour la première fois depuis la guerre d'Algérie, la France est devenue le premier terrain d'intervention de l'armée tricolore. En novembre dernier, histoire de donner à l'état les moyens de ses ambitions, le ministère des finances a annoncé une hausse de 815 millions d'euros pour les crédits alloués aux mesures de sécurité<ref>http://abonnes.lemonde.fr/attaques-a-paris/article/2015/11/30/le-budget-2016-prevoit-815-millions-d-euros-de-credits-alloues-aux-mesures-postattentats_4820717_4809495.html</ref>.


"L'intégralité des services de police cumulerait 20 millions d'heures supplémentaires" : http://is.gd/lepBfk
Et après ? Mettons en pause l'urgence des chiffres pour écouter d'autres voix. Celles d'une politologue et d'un philosophe par exemple.


"Avec l'opération Sentinelle plus de 10.000 militaires patrouillent actuellement sur le sol français" : http://is.gd/Q7ddk5 + http://is.gd/1vLWW4 + http://is.gd/wgEhEv
=== Conclusion ===
À nous les montres ! À nous les calendriers ! Libérons le temps !


"En novembre dernier, le ministère des finances a annoncé une hausse de 815 millions d'euros pour les crédits alloués aux mesures de sécurité" : http://is.gd/YK5ruB
19 novembre 2015 : 98,7% des députés votent la première reconduction de l'état d'urgence. Six votent contre.<ref>http://www2.assemblee-nationale.fr/scrutins/detail/%28legislature%29/14/%28num%29/1191</ref> 16 février 2016 : 86% d'élus restent favorables à une seconde prolongation<ref>http://www2.assemblee-nationale.fr/scrutins/detail/(legislature)/14/(num)/1238</ref>. À force d'urgence, on n'entend plus qu'une seule voix. Celle de son maître. Et plus ça dure, plus le refrain s'épuise.


"19 novembre 2015 : 98,7% des députés votent la première reconduction de l'état d'urgence. Six votent contre" : http://is.gd/YNnUjF
Faire vite, répondre tout de suite. Entrer dans la course-poursuite en se disant qu'après tout, on a les jambes pour reprendre le dessus. Et si finalement, c'était une partie du piège ?


"16 février 2016 : 86% d'élus restent favorables à une seconde prolongation" : http://is.gd/EhXJvk
Tant que l'on courre, on oublie de regarder autour. Si cette urgence nous empêche de penser, quelles blessures peut-elle bien panser ?
 
Les lois s'empilent comme des couches de peurs successives et nous laissons chaque bandages en place. Sans jamais regarder l'état de la plaie, en dessous. Bien sûr ! On préfère se tartiner le quotidien de sécuritaire. On est accrocs aux cachets de surveillance. « Il a bien pris sa température ? Quel degré d'alerte aujourd'hui ? »
 
Quoi de plus normal ? On a eu peur, c'est vrai. On a même été terrifiés. Dans les premières heures, l'urgence rassure, oui. Elle protège. Mais plus elle s'installe, plus elle inquiète. Elle devient rôdeur. On se promène avec, en poche, notre suspicion et nos peurs.
 
« Attentifs ensemble », nous répète-t-on à longueur de couloirs. Mais attentifs à quoi ?
 
Aux risques, aux dangers, aux angoisses ? Ça va, elles sont bien là, merci.
 
Et si on la jouait différemment ? Soyons attentifs, très bien, mais à nous, à l'autre, à notre démocratie. En reprenant ce temps qui nous appartient, est-ce que l'on pourrait équilibrer à nouveau la balance de notre République ? Celle où nos peurs cesseraient de peser plus lourd que nos espoirs.


BONUS :
BONUS :


== Sources ==
=== Sources principales ===
<references />
=== Sources secondaires ===
"État d'urgence et autres régimes d'exception" : http://is.gd/Ud0a0g
"État d'urgence et autres régimes d'exception" : http://is.gd/Ud0a0g


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"Le brouillard de l'état d'urgence" : http://is.gd/38l4u5
"Le brouillard de l'état d'urgence" : http://is.gd/38l4u5
== Sources ==
=== Sources principales ===
=== Sources secondaires ===


=== Sources complémentaires ===
=== Sources complémentaires ===
Des articles, des vidéos, des émissions viendront poursuivre la réflexion.


== Crédits ==
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