« Neutralité, j'écris ton nom (EP.23) » : différence entre les versions
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Version du 20 juin 2017 à 16:25
Script
Posséder une route n'autorise pas à choisir les voitures qui l'empruntent. Bonjour !
Sur internet, tous les « paquets » naissent libres et égaux en droits. Les « paquets », ce sont les petites valises qui transportent les informations circulant sur le réseau des réseaux. Tel qu'il a été créé, le net n'est qu'un tuyau qui transporte tous ces paquets, de façon neutre, quelque soit leur contenu. C'est ce que l'on appelle « la neutralité du net ».
Cela n'a rien de novateur. Après la seconde guerre mondiale, en France, le Conseil National de la Résistance proclamait déjà la neutralité de la correspondance et l'appliquait à la Poste. Le rôle du facteur est de transmettre la lettre de Jean à Stéphane. Peu importe son contenu.
Mais, internet grandissant, les entreprises chargées de gérer les tuyaux - les fournisseurs d'accès - ont pris de l'importance. Or les plus gros opérateurs, comme les américains Time Warner ou ComCast, produisent aussi des contenus pour remplir ces mêmes tuyaux. Du coup, quand ils voient passer gratuitement sur le net des choses similaires à ce qu'ils vendent dans leurs offrent câblées, la tentation est grande de fermer le robinet.
En 2008, aux États-Unis, ComCast a été condamné par la FCC, la Commission Fédérale des Communications. Le géant américain avait tranquillement choisi de modifier les « paquets » provenant de BitTorrent, un réseau d'échanges de fichiers en peer-to-peer. Ces paquets, une fois transformés, faisaient sauter la connexion de l'utilisateur et empêchaient le transfert.
En 2013, en France, l'opérateur Free a supprimé par défaut chez ses abonnés toutes les publicités sur Youtube. De quoi faire pression sur le géant Google. Deux exemples où, non seulement le facteur ouvre l'enveloppe mais en plus il réécrit la lettre selon ses besoins !
Dernièrement, la surcharge du réseau est devenue le nouveau chiffon rouge agité par les géants des télécoms. Certains fournisseurs de contenus « boucheraient » les tuyaux ! Selon une étude, Netflix par exemple utiliserait 34% de la bande passante aux États-Unis aux heures de pointe. Étude menée par l'entreprise canadienne Sandvine, dont le business est justement de vendre des outils de régulation du réseau. C'est d'ailleurs les services de Sandvine qui bridaient Bittorrent dans les tuyaux de ComCast. Un détail.
Heureusement, les fournisseurs d'accès ont la solution miracle : faire payer les services les plus gourmands, comme Netflix. Ceux qui pourront signer le chèque deviendront alors prioritaires dans les tuyaux. Comme si on ouvrait une voie VIP sur toutes les autoroutes, uniquement réservée à quelques grosses berlines. Pendant que les autres restent coincés dans les bouchons. La bataille en cours est bien celle des contenus et de leur business.
L'accord TISA, en négociation depuis 2012 au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce, le confirme. Il doit encadrer le commerce des services entre 50 pays du globe, 70% du marché mondial. Et l'un de ses paragraphe pourrait bien tordre la neutralité du net. Celui qui soumet « l'accès aux services et applications à une gestion raisonnable du réseau ». Juste ce qu'il faut de flou pour permettre un internet à deux vitesses.
Et, pendant que les grosses berlines rouleront sur leur voie privée, tous les autres contenus resteront dans les bouchons. Les posts de blogs, les vidéos anodines, les services encore inconnus, tout ce que chaque citoyen pourrait avoir envie de publier ou créer, librement.
En visant la neutralité du net, les fournisseurs d'accès s'attaquent à la liberté d'expression en ligne. Et glissent vers un modèle qui a fait leur gloire : la télévision. Où quelques uns décident ce que la masse doit voir, en priorité.